Est-ce que vous « somniloquez »?

Ginevra Uguccioni, Unité Pathologies du sommeil -Hôpital Pitié-Salpêtrière (Paris),  récipiendaire d’une bourse de voyage Jeune Chercheur 2014, reprend « Parler en dormant : étude du langage chez des patients somniloques », une communication qui sera présentée lors du Congrès du Sommeil® 2014.

La somniloquie, c’est-à-dire le fait de parler en dormant, est un phénomène relativement fréquent puisque 71% des hommes et 75% des femmes affirment avoir déjà parlé dans leur sommeil. En revanche seule 1,5% de la population adulte serait quotidiennement somniloque. La somniloquie n’est pas vraiment considérée comme une maladie, dans la mesure où elle engendre peu de souffrance ou de gêne du dormeur et de son voisin de lit, en dehors d’un possible dérangement sonore et de la divulgation de secrets. C’est pourquoi la somniloquie reste un phénomène mystérieux et très peu étudié par les scientifiques bien qu’elle présente un intérêt scientifique certain.

 La somniloquie peut se manifester seule mais s’associe souvent à certains troubles du sommeil comme le somnambulisme ou le trouble du comportement en sommeil paradoxal (TCSP), maladie qui se caractérise par une extériorisation des rêves.

 Au cours de notre étude nous avons recueilli et analysé les paroles nocturnes de 232 patients somnambules et avec TCSP, pour en étudier les caractéristiques et actualiser le peu de données existant sur la somniloquie. Ce langage nocturne peut se composer de chuchotements, marmonnements, rires, pleurs, cris et paroles intelligibles. De plus, chez les patients somniloques, le geste accompagne souvent la parole. Les patients souffrant de TCSP ont plus tendance à rire, à marmonner ou à remuer les lèvres sans émettre de sons. A contrario les somnambules présentent eux plus de chuchotements, de mots ou de phrases répétés, mais aussi un langage ordurier et des mouvements associés au langage. Le langage nocturne semble présenter les mêmes caractéristiques que le langage éveillé.

Un second objectif de notre étude a été celui de rechercher l’existence d’une participation du cortex à l’élaboration du langage humain pendant le sommeil, à travers la recherche d’une inspiration précédant la prise de parole. On retrouve une large inspiration précédant la parole dans 33% des verbatim, autant chez les somnambules que les patients avec TCSP ce qui témoigne de l’existence d’une préparation à la parole de nature respiratoire d’origine corticale dans le sommeil.